Netflix, Max, Disney, Peacock, Paramount+ et Hulu ont dévoilé leurs résultats financiers pour le 1er trimestre 2024 et on regarde tout ça avec des graphiques.
Avant-propos
Quelques petites choses sont à garder à l’esprit en regardant les graphiques suivants et la plus importante est sans doute que les différents services n’opèrent pas sur les mêmes aires géographiques.
- Netflix est dispo dans 190 pays.
- Disney+ est dispo dans 110 pays et territoires.
- HBO Max est dispo dans 61 pays et Warner Bros Discovery ne communique que sur HBO Max et Discovery+ cumulés.
- Paramount+ est dispo dans 57 pays.
- Hulu et Peacock sont dispos dans un seul pays (les Etats-Unis).
Donc ce sont des comparaisons imparfaites même si certains indicateurs peuvent être comparés, comme le revenu moyen par abonnement et d’autres.
Glossaire :
- UCAN : US et Canada
- LATAM : Amérique Latine
- EMEA : Europe, Moyen-Orient et Afrique.
- APAC : Asie – Pacifique.
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Les services mondiaux
On commence ce tour d’horizon avec la grosse annonce de Netflix ce trimestre : la fin programmée du chiffre d’abonnés à l’horizon mars 2025. Dans 4 trimestres financiers, nous pourrons dire au revoir à cette visualisation :
L’histoire que veut raconter Netflix aux investisseurs est différente. Bye bye le chiffre d’abonnés et l’ARPU, bonjour les revenus. C’est vraiment dommage et forcément, cela ressemble à une action défensive, puisqu’on peut imaginer que la croissance va stagner du côté de Netflix dans les années qui viennent et donc cachez ce nombre que je ne saurais voir. Je peux comprendre la logique : rappelez-vous en 2022 quand tous les streamers ont été punis par les marchés financiers quand Netflix a perdu 200 000 abonnés, ce qui a entrainé des réductions d’investissements de tous les studios dans le streaming. Juste 200 000 abonnés de moins, à l’échelle mondiale sur plus de 230 millions à l’époque. Netflix veut donc sans doute éviter cela à l’avenir tout en pointant du doigt que le nombre d’abonnés ne veut plus vraiment dire grand chose non plus pour eux.
En effet, depuis l’abonnement avec pub et surtout l’ajout de foyers supplémentaires au sein d’abonnements existants (qui n’augmentent pas le nombre total d’abonnés), leur position est de dire que ce nombre n’est pas représentatif du nombre d’utilisateurs, ce qui est vrai aussi. Mais le nombre d’abonnés reste un marqueur important et que Netflix décide de le cacher volontairement est tout de même dommageable.
Les revenus, les revenus, les revenus, voilà l’histoire que veut raconter Netflix et forcément, cette histoire est plutôt flatteuse.
9,3 milliards de revenus pour 2,3 milliards de bénéfices, c’est effectivement la preuve que le streaming est un bon business (quand il est bien fait) et enlever le nombre d’abonnés permet de se focaliser sur cela.
Les indicateurs sont au beau fixe et dans la lettre aux investisseurs, Netflix revient sur un point intéressant au niveau du produit, à savoir l’importance capitale de l’application dans la découvrabilité et la promotion des titres à venir. C’est un point que je rappelle souvent personnellement parce que c’est souvent trop sous-estimé pour expliquer comment des titres peuvent devenir des succès sur le service en sortant de nulle part. Justement, ils ne sortent pas de nulle part, sauf à de très rares exceptions. L’application est le centre du monde Netflix et niveau promotion, elle fait plus que des services comme Youtube par exemple.
Bande-annonce dans la partie “A venir” – Fonction “Me rappeler” – Algorithme de recommandation – Top 10 et voilà un cycle plutôt vertueux de découvrabilité où les trous dans la raquette sont plutôt faible. Ils continuent plus bas avec l’importance aussi des réseaux sociaux qui permettent de combler un peu plus ces trous dans la raquette, comme ce fut le cas pour “Baby Reindeer” notamment.
Les résultats financiers du 1er trimestre 2024 de Disney +
Du côté de Disney+, c’est le trimestre du passe-passe avec 8 millions de nouveaux abonnés au service aux US et au Canada après des mois de stagnation. Impact de Taylor Swift ou des nouveaux programmes de Disney+ ce trimestre ? Que nenni puisque c’est surtout le résultat d’un accord entre Disney et Charter visant à ajouter d’office le service dans environ 14 millions abonnements TV et internet déjà existants.
Dans le reste du monde, là où de tels tours de passe-passe n’ont pas eu lieu, le nombre d’abonnés est en baisse pour le deuxième trimestre consécutif.
Mais les revenus augmentent ce trimestre, grâce aux augmentations de prix de l’abonnement.
Le revenu moyen par abonné baisse aux Etats-Unis (conséquence de l’accord avec Charter) mais il augmente dans le reste du monde (conséquence des hausses de prix). En Inde, je ne comprends pas trop comment le revenu moyen par abonné a pu doubler au trimestre dernier puis être à nouveau divisé par deux pour ce trimestre.
Les revenus de Disney+ et Hulu augmentent (pas ceux de la publicité par contre) et enfin, les deux services combinés sont profitables, avec 47 millions de dollars de bénéfices. C’était l’objectif pour 2024 et on y est presque à coup de réductions d’investissements dans les programmes et d’hausses de prix.
Du côté du cinéma par contre, c’est pas encore ça ce trimestre avec seulement 123M de dollars de revenus dans le monde, le pire trimestre depuis le 1er trimestre 2021. C’est pas foufou non plus pour la VOD et l’exploitation physique qui flirtent avec leur plus bas niveau.
L’exploitation ciné mondiale des films Disney/Fox ces 15 derniers mois a rapporté autant que le meilleur trimestre de Disney en 2019. Il y a un truc à dire quand même sur l’inversion totale des paramètres du secteur pour Disney. En 2019, avant le lancement de Disney+, l’exploitation ciné rapportait 1 milliard de dollars minimum par trimestre en moyenne, l’exploitation physique/VOD environ 500 millions et les ventes des droits des programmes environ 1,5 milliard de dollars par trimestre environ.
Flash forward 5 ans plus tard : l’exploitation ciné dépasse désormais rarement les 600 millions de dollars par trimestre, l’exploitation physique/VOD ne dépasse plus les 300 millions de dollars depuis deux ans et les ventes de droits des programmes à d’autres ne dépassent plus les 600 millions de dollars depuis un an aussi. Donc de 3 milliards environ par trimestre, on est passé à la moitié, 1,5 milliards environ pour ces fenêtres d’exploitation traditionnelles. Mais dans le même temps, Disney+ rapporte lui désormais plus 2,5 milliards de dollars par trimestre. Une inversion totale par rapport à 2019 et on peut se demander si la sortie de Disney+ a été le fossoyeur des autres segments, ou si le COVID plus la Marvel fatigue a joué. Les réponses se trouvent entre les deux, j’imagine et sur le graphique comparatif, on voit bien le point d’inflexion au Q1 2020, pile quelques semaines après le lancement de Disney+ et au début de la pandémie. Sujet fascinant.
Les résultats financiers du 1er trimestre 2024 de HBO Max
Du côté de chez Max (ou plutôt HBO/Max/Discovery+/BluTV puisque le nombre d’abonnés est cumulé), les choses progressent, au moins du point de vue du streaming. Les 4 services cumulés s’approchent des 100 millions d’abonnements payants dans le monde.
Pour le prochain trimestre, on devrait voir notamment une amélioration à l’international puisque Max va se lancer dans 29 pays, dont la France le 11 juin, juste à temps pour la sortie de la S2 de “House of the Dragon” (et aussi la fin du trimestre financier, ce qui doit être aussi important). Du côté de l’ARPU, pas de gros changements. Il augmente aux US, il diminue à l’international.
Les revenus sont en hausse mais comme d’habitude avec Warner Bros Discovery, ne vous laissez pas berner par leurs annonces que Max est profitable. La division Streaming a 86M$ de bénéfices mais elle comprend les revenus (très bénéficiaires) de la chaine linéaire HBO.
Les revenus de la vente de droits me paraissent très faibles et je me demande si ceux de la vente des droits des films n’est pas dans un autre segment. La grosse annonce de ce trimestre pour Max et Disney, c’est la création prochaine d’un bundle Disney+, Hulu et Max. On verra ce que ça donne.
Les résultats financiers du 1er trimestre 2024 de Paramount +
C’est un peu le bazard chez Paramount en ce moment, mais du côté du service de streaming, la croissance est plutôt encourageante avec un service qui atteint désormais 71,2 millions d’abonnés.
Les revenus augmentent, les pertes diminuent et l’avenir du service est au centre des négociations parmi les repreneurs potentiels. Certains analystes pensent que le service devrait être fermé, d’autres pensent que non.
Dans tous les cas, les mois qui arrivent vont être cruciaux pour Paramount et Paramount+ par extension.
- Panorama des services mondiaux en ce Q1 2024.
A l’échelle mondiale, Netflix continue d’être en tête, en affichant la meilleure progression ces derniers trimestres, grâce à la fin du partage de compte. Disney et Max vont embrayer dans les mois qui viennent sur ce sujet, donc on verra si ça porte ses fruits.
Hulu : Les services disponibles qu’aux US
Chez Hulu, le nombre d’abonnés augmente lentement mais sûrement aux US, malgré une baisse du revenu moyen par abonné.
On sentira peut-être au prochain trimestre les effets de l’intégration du catalogue d’Hulu au sein de Disney+.
Les résultats financiers du 1er trimestre 2024 de Peacock
Peacock continue lui aussi son petit bonhomme de chemin et a à nouveau ajouté 3 millions d’abonnés, comme aux trimestres précédents. Ce trimestre a été marqué par le match de football US diffusé en exclusivité sur Peacock mais est-ce que ça a fondamentalement changé la donne ? Difficile à dire puisque la hausse est la même qu’au trimestre précédent.
Les revenus sont en hausse mais les pertes restent très élevées, à 639 millions de dollars.
- Panorama des services aux US en ce Q1 2024.
Aux US, on voit bien les effets chez Disney+ de son accord avec Charter, et on voit aussi la belle progression de Peacock.
C’est tout pour ce trimestre financier ! Si vous avez des questions ou des remarques, il y a toutes les façons de me contacter ci-dessous. On se retrouve dans quelques jours pour l’étude des derniers chiffres de Netflix.